lundi 10 avril 2017

Le blog ultranationaliste Breiz Atao en partie déréférencé de Google

Le site d’extrême droite, condamné à de multiples reprises par les tribunaux français, ne sera plus indexé dans le moteur de recherche


Article du journal Le Monde


Le site d’extrême droite Breiz Atao, dont l’administrateur a été condamné à de multiples reprises par la justice pour incitation à la haine, a été déréférencé de Google, révèle le quotidien Le Télégramme. Le site est toujours accessible, mais sa page d’accueil n’apparaît plus dans les résultats de recherche de Google - ses articles et rubriques sont cependant encore trouvables dans le moteur de recherche.
Ce déréférencement fait suite à une énième condamnation de son administrateur, Boris Le Lay, militant ultranationaliste breton, qui affirme vivre au Japon. Le 15 décembre 2016, le tribunal de Rennes avait, en référé, donné raison à un homme qui estimait être diffamé par le site, qui l’accusait d’être un « financier occulte » d’une « mosquée salafiste » dans le cadre d’une « campagne d’insultes racistes et de provocation à la haine raciale ».
Jusque-là, rien que de très classique. Boris Le Lay a été condamné à au moins six reprises pour des faits similaires : depuis sa dernière condamnation en date, à deux mois de prison ferme en avril 2016, il fait l’objet d’un mandat d’arrestation. Plusieurs autres plaintes, pour incitation à la haine ou menaces de mort, sont toujours en cours d’instruction.

Décision rare

C’est l’ensemble de ces condamnations passées, ajoutées au fait que l’administrateur ait tenté à plusieurs reprises de masquer son identité, qui a conduit le tribunal de Rennes à prendre une mesure rare (pdf) : ordonner la suppression totale du site, et non des seuls articles incriminés. « Il apparaît que la seule mesure susceptible de mettre un terme à la poursuite de l’infraction d’incitation à la discrimination et à la haine raciale, est de condamner personnellement Boris Le Lay à supprimer le site Breiz Atao », écrit le tribunal dans son ordonnance.
Une suppression qui était demandée par l’avocat du plaignant, Fabian Lahaie, pour qui la fermeture globale du site était « la seule option efficace possible ». « C’est une possibilité qui est prévue par la loi, même si elle est rarement utilisée : l’article 50-1 de la loi sur la presse permet de le demander, depuis peu, pour faire cesser un  "trouble manifestement illicite" ».
Le principal intéressé n’a pas tenu compte de cette condamnation, mais la décision a été transmise à Google (pdf) par Gilles Clavreul, le délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme. Le moteur de recherche, qui ne procède à des déréférencements que lorsqu’une décision de justice l’exige, semble avoir considéré que la demande de suppression du site était équivalente à une demande de déréférencement... au moins de la page d’accueil du blog. La loi sur la confiance dans l’économie numérique prévoit, en effet, de manière plus large que les opérateurs du Web doivent « concourir à la lutte contre la diffusion des infractions [d’incitation à la haine] ».
D’après le dernier bilan du plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme gouvernemental, 26 477 messages haineux avaient été signalés sur la plate-forme centralisée Pharos en 2015, dernière année pour laquelle des chiffres ont été publiés. Ces deux dernières années, la délégation interministérielle dit avoir directement saisi le procureur de la République dans une centaine de cas.
Mise à jour le 10 avril : précision du caractère partiel du déréférencement

Damien Leloup 
Responsable de la rubrique Pixels